Le 76

Un dépanneur 100 % local est arrivé en ville : Toutes les choses parfaites!

Dans le Technopôle Angus, à environ 10 minutes en voiture du Parc olympique, l’ancienne propriétaire du Café In Vivo, Karine Martel, a ouvert un nouveau commerce bien particulier : Toutes les choses parfaites, un dépanneur qui contient des produits à 100 % de marques locales.

Curieuse d’en apprendre plus sur cette initiative unique en son genre dans le quartier, l’équipe du Webzine Le 76 s’est entretenue avec l’entrepreneure.

 

Le 76 : Karine, merci de prendre part à l’entrevue. Pour commencer, parle-nous un peu de ton parcours?

D’abord, j’ai étudié en théâtre et suis devenue marionnettiste professionnelle pendant plusieurs années, en plus de jouer au basketball. Ces deux passions, pratiquées en parallèle pendant des années, ont formé la professionnelle que je suis.

Puis, en 2005, j’ai ouvert avec deux partenaires mon premier restaurant, le Bistro In Vivo, sur la rue Sainte-Catherine dans Hochelaga. J’ai donc abandonné ma carrière de marionnettiste et le basketball pour me consacrer corps et âme à la cuisine. Avec cette même équipe, nous avons ouvert quelques années plus tard un magasin de produits écologiques ainsi que la Station In Vivo, le premier café au Stade olympique, renommé ensuite Café In Vivo après le départ de mes associés et la vente du Bistro. J’ai donc piloté ce beau restaurant pendant sept années jusqu’à sa fermeture en octobre 2020.

 

Le 76 : Qu’en est-il à propos de cette fermeture?

J’étais super bien au Parc olympique! J’étais bien épaulée, nous avions une belle relation. Puis, la pandémie est arrivée en 2020. Le café a dû fermer pendant six mois. Lors de la réouverture en septembre, nous avons bien essayé de nous adapter et le Parc olympique a tout fait pour nous garder, mais les clients n’étaient plus au rendez-vous. Les employés qui avaient l’habitude de passer au café étaient en télétravail et il n’y avait plus d’événements. J’ai toujours su que le domaine de la restauration était précaire, mais pas à ce point. On se réveille un matin et l’aventure est finie. Je savais par contre que j’avais tout fait pour maintenir mon resto en vie. Le 2 octobre 2020, jour où j’ai fermé le Café In Vivo, cela faisait 15 ans, jour pour jour, que j’avais ouvert mon premier restaurant. Je me suis dit que j’avais bouclé la boucle avec la restauration.

 

Le 76 : Après cette fermeture, tu t’es lancée dans un nouveau projet : l’ouverture de Toutes les choses parfaites. Peux-tu nous en dire plus?

En septembre 2020, j’étais dans un état bizarre. Je voyais mon restaurant couler et je savais que c’était terminé. J’étais triste. Puis, je suis allée voir une pièce qui s’appelait Toutes les choses parfaites, au théâtre Jean-Duceppe, excellente pièce qui fait du bien, où le personnage, seul sur scène, dresse une liste de 1 000 choses parfaites dans une vie.

Forcément, en voyant la pièce, on fait aussi l’exercice et toutes les choses que j’énumérais ce soir-là dans ma tête se retrouvent aujourd’hui dans mon dépanneur : le vin, le chocolat noir, l’huile d’olive, les plantes, le café… Quand je suis sortie je me suis dit : « Ayoye, c’est ça le nom de mon commerce! » Je ne savais pas encore quelle serait la forme exacte de l’entreprise, mais je savais que c’était Toutes les choses parfaites.

 

Le 76 : Quelle belle histoire!

Oui, vraiment! J’ai même écrit à la direction artistique du théâtre Jean-Duceppe pour leur en parler et on m’a gentiment donné l’autorisation d’utiliser le nom pour mon commerce.

J’ai ensuite réservé un local dans le Technopôle Angus en janvier 2021 et ouvert Toutes les choses parfaites en novembre. Mes employés sont d’ailleurs de bons vieux amis qui travaillaient avec moi au Café In Vivo. J’en suis si reconnaissante!

Karine Martel, à gauche, avec son équipe

Le 76 : Que peut-on retrouver chez Toutes les choses parfaites?

On trouve tout ce qu’il y a dans un dépanneur conventionnel (sauf cigarettes et loteries), mais totalement des marques locales, presque entièrement québécoises. Nous vendons de la bière, du cidre et du vin, des nachos, de la salsa, des noix et des croustilles. Nous offrons des viennoiseries d’un fournisseur dans Hochelaga (Les Touriers), comme auparavant au In Vivo, du café en vrac et nous servons le café pour emporter.

Nous vendons également des détergents en vrac, du savon artisanal et autres produits corporels et de première nécessité. Côté cuisine, il y a de l’huile d’olive et du vinaigre en vrac, des épices, ainsi que tous les produits de base, comme du lait, du pain frais, de la farine, des conserves, des pâtes, etc., sans oublier une belle sélection de thé et de café, des charcuteries et du prêt à manger. Pour les dents « sucrées», nous avons des bonbons et des chocolats faits à la main, des caramels et des confitures.

Pour le reste, on peut trouver des revues, des cartes de souhait, des bougies et autres produits de maison qui s’offrent très bien en cadeau pour toutes les occasions. Et tout ça, c’est québécois, sauf quelques produits de marques canadiennes. Ah oui… et nous avons plein de plantes!

La réaction des gens a été exceptionnelle! C’est grâce à eux que je me suis rendu compte que j’étais finalement seule à réunir tous ces articles sous un même toit. Pourtant, ce n’est pas compliqué de trouver des fournisseurs québécois, il y en a tellement!

Le 76 : On peut dire que la provenance québécoise des produits est ce qui rend spécial Toutes les choses parfaites!

Pourtant, ça fait tellement longtemps que je travaille avec des produits québécois dans les cuisines que c’était naturel pour moi d’en offrir dans le dépanneur. Je ne trouvais pas que j’avais inventé quelque chose de spécial, mais la réaction des gens a été exceptionnelle! C’est grâce à eux que je me suis rendu compte que j’étais finalement seule à réunir tous ces articles sous un même toit. Pourtant, ce n’est pas compliqué de trouver des fournisseurs québécois, il y en a tellement! C’est sûr que les olives, le café, le cacao utilisé dans le chocolat noir, ça ne pousse pas ici, mais nous faisons affaires avec des entreprises du Québec, qui elles font affaires avec des coopératives dans les pays où l’on cultive ces aliments et qui en font la transformation.

 

Le 76 : Il y a une croyance répandue selon laquelle les produits locaux coûtent cher. As-tu eu l’impression que cela pouvait être un frein pour tes clients?

À ma connaissance, il n’y a pas eu de clients qui se sont plaints des prix. La pandémie a d’ailleurs mis en lumière les produits québécois, alors c’était le bon moment pour ouvrir.

Il faut tenir compte du fait que les compagnies québécoises ne produisent généralement pas de gros volumes. Leur production coûte donc plus cher, le coût du loyer et de la main-d’œuvre aussi. Et avec la pandémie, tout a augmenté. De plus, les produits ne sont pas remplis de toutes sortes d’ingrédients de remplissage. Beaucoup de gens l’ignorent.

Bref, ce sont des produits de qualité, faits par des employés dans de bonnes conditions de travail, dans le cadre de petits volumes de production. Le prix est tout à fait justifié. Quand on l’explique aux clients, ils comprennent. Cela étant dit, nos produits ne sont généralement pas plus chers qu’au Provigo! Certains clients sont même agréablement surpris lorsqu’ils passent à la caisse.

 

Le 76 : Nous avons remarqué la belle identité de marque, qui accroche tout de suite l’œil quand on visite le site Web. D’où provient l’inspiration derrière celle-ci?

De ma tête et de l’immense talent de mon graphiste, Jeff Martin (Atelier Aquo), qui avait aussi créé l’image de marque du In Vivo. Avec le nom Toutes les choses parfaites, il fallait faire attention pour ne pas avoir l’air prétentieux. Je voulais un air de bande dessinée et du orange, la couleur du basketball (eh, eh)! Mon graphiste a une signature très ludique et bon enfant. Tout ce qu’il m’a proposé était parfait à tous les coups. Quant au design intérieur, cela revient à Rübik Design, la même boîte qui a rénové le In Vivo juste un peu avant sa fermeture. Et en passant, nous avons tout fait nous-mêmes et nous en sommes bien fiers!

En 2022, est-ce qu’on peut aller au dépanneur sans être éclairé au néon? Est-ce qu’on peut avoir des produits québécois? On est rendu là.

Enfin, je n’ai pas cherché un slogan, mais « On est rendu là, vous ne croyez pas? » est venu naturellement en parlant avec les clients. Ils me disent: « Ce n’est pas un dépanneur, c’est bien trop beau. C’est une boutique, une épicerie fine… » et je réponds naturellement : « Non, c’est un dépanneur! En 2022, est-ce qu’on peut aller au dépanneur sans être éclairé au néon? Est-ce qu’on peut avoir des produits québécois? On est rendu là. » Et c’est donc devenu notre slogan!

Le 76 : Nous sommes bien d’accord, on est rendu là! Félicitations pour cette belle initiative. Espérons que Toutes les choses parfaites sera une inspiration et un modèle pour les autres commerces du Québec!