Rencontre avec Joëlle Brodeur, une PDG tournée vers l’avenir
Après avoir été dirigé par Michel Labrecque pendant une décennie, le Parc olympique a entamé une nouvelle ère avec la nomination de sa nouvelle PDG, Joëlle Brodeur, en juillet dernier. Une nomination qui marque plusieurs grandes premières pour le Parc : Mme Brodeur est non seulement la première femme à avoir été nommée à ce poste, mais aussi la première PDG issue de l’interne et la plus jeune à l’occuper. Un message fort pour cette période charnière de l’organisation : la volonté de transformer et développer le Parc olympique à la hauteur de son immense potentiel.
En ce début d’année, Le 76 a rencontré Mme Brodeur pour en apprendre plus sur sa vision.
Le 76 : Qu’est-ce qui vous a attirée vers le poste de PDG du Parc olympique?
Ça fait maintenant presqu’une décennie que je fais partie de l’organisation. J’ai eu la chance d’occuper différentes fonctions, comme professionnelle et comme gestionnaire, mais surtout, de fil en aiguille, j’ai été amenée à diriger des initiatives et des projets stratégiques et structurants. Ces mandats m’ont permis d’apprendre à connaître et à aimer le Parc olympique pour ce qu’il est vraiment, pour ses enjeux et ses défis, et aussi son immense potentiel. Je suis arrivée quand nous étions encore une « régie » et j’ai vécu l’effervescence qui nous a amenés à devenir une « société de développement et de mise en valeur ». Je suis extrêmement fière de la transformation qui s’opère et du rôle que l’on peut et doit jouer pour le Quartier olympique, l’est de Montréal, la ville et le Québec. La nouvelle mission va permettre de bâtir sur un legs historique incroyable et c’est ce qui m’a attirée vers le poste : l’opportunité et le privilège exceptionnel de valoriser, transformer et moderniser notre parc urbain, de le tourner vers l’avenir et de le réinventer pour les 50 prochaines années.
Le 76 : Comment décririez-vous votre mandat au sein de l’organisation?
Les gens connaissent bien l’histoire du Parc olympique, mais ne connaissent pas forcément la transformation en cours et son plein potentiel. Mon mandat, c’est de développer ce potentiel et de le faire connaître. C’est un mandat transformationnel, un point tournant pour l’organisation, qui s’inscrit dans la continuité des accomplissements et des grands jalons franchis par mes prédécesseurs. De la relance avec les premiers partenariats stratégiques pour animer nos espaces extérieurs à l’adoption de la nouvelle loi qui nous donne des coudées plus franches au niveau commercial, du rayonnement de sa valeur patrimoniale à la réalisation de grands projets de modernisation de certaines infrastructures. Ce sont des fondations solides et mon rôle, c’est d’accompagner les équipes pour concrétiser nos grandes ambitions organisationnelles : poursuivre notre transformation commerciale, livrer nos grands chantiers qui mèneront à la réouverture des espaces touristiques de la Tour de Montréal et du Stade olympique, développer et consolider nos partenariats stratégiques et valoriser et animer chacun des sites de notre grand parc urbain.
Le 76 : Quelles sont vos priorités immédiates?
Ma prise de fonction s’est faite alors que plusieurs grands chantiers sont en cours : la rénovation des espaces touristiques de la Tour de Montréal et le remplacement de la toiture du Stade olympique, mais également l’importante opération après sinistre, depuis l’incendie déclenché au pied de la Tour en mars dernier. Les priorités immédiates sont donc axées sur la poursuite de leur bon déroulement, tout en assurant la coexistence harmonieuse avec notre programmation extérieure riche et variée, qui non seulement ne s’arrête pas, mais continuera de se bonifier. L’été 2024 a permis de démontrer que nous pouvons livrer une saison événementielle avec succès et animer l’ensemble de nos sites extérieurs en même temps que des chantiers majeurs!
Le 50e anniversaire de l’organisation et des Jeux olympiques arrive à grands pas. Nos énergies sont également tournées en priorité vers la préparation des célébrations pour 2026.
Sur le plan stratégique, nous poursuivons notre transformation commerciale pour concrétiser la nouvelle mission que nous a donné le gouvernement. Il est donc prioritaire de mettre en place les conditions de succès pour matérialiser le plein potentiel commercial de chacun de nos sites, ce qui passe notamment par la consolidation des relations avec nos partenaires stratégiques.
Le 76 : Quels sont les principaux défis à relever et comment comptez-vous les surmonter?
La livraison des grands chantiers et le renouvellement des propositions commerciales lors des réouvertures demeurent les principaux défis à relever. Je suis confiante parce que ce sont des projets structurants bien planifiés, menés par des équipes talentueuses et grandement mobilisées.
Faire connaître le potentiel du Parc olympique est aussi un défi qu’il faut nommer. Le potentiel est là, le Parc est bien vivant, mais son rayonnement est encore limité et nous allons devoir déconstruire plusieurs idées bien ancrées. Beaucoup pensent encore qu’il ne se passe rien au Quartier olympique ou que les chantiers entraînent un ralentissement ou une suspension des activités. Il n’en est rien! Nous offrons une programmation annuelle variée, avec des activités et événements de toutes envergures. Elle continuera de se bonifier au fil des années et, avec nos partenaires sur le site, nous allons faire vibrer le parc urbain à toutes les échelles!
Le Parc olympique, c’est bien plus qu’un stade, c’est un parc urbain multifonctionnel. L’amphithéâtre demeure un actif important, central et stratégique, et nous visons sa pleine exploitation, mais nous ciblons aussi celle des autres sites, qui ont leurs activités et leurs clientèles spécifiques : le complexe sportif qui regroupe les membres du Centre sportif et les athlètes de haut niveau de l’Institut national du sport du Québec, la Tour de Montréal, avec ses 14 étages locatifs occupés à 100 % et ses espaces touristiques au sommet – l’un des plus beaux observatoires en Amérique du Nord – et nos espaces extérieurs avec leurs quelque 340 000 m2 à activer et programmer. C’est un parc public, accessible en transport en commun et doté de 4 000 places de stationnement. Si on ajoute les installations muséales d’Espace pour la vie, les installations sportives de la ville, le Stade Saputo et un projet d’hôtel, on a là les ingrédients d’un Quartier olympique attractif, effervescent et vecteur d’une véritable création de valeur. Il faudra donc relever ces défis ensemble pour matérialiser une vision commune bénéfique pour tous.
Concert de NOFX et match du CF Montréal, août 2024. Crédit : SNAPePHOTO, Patrick Beaudry.
Le 76 : Comment envisagez-vous d’accompagner le Parc dans son virage commercial?
Ce virage est déjà bien amorcé et s’inscrit dans notre nouvelle mission, qui vise à réaliser le plein potentiel du Parc olympique en tant que grand parc urbain. La réflexion centrale s’articule sur comment chacun des sites peut atteindre son propre plein potentiel. Dans certains cas, ça passe par la modernisation des installations et des propositions commerciales. J’aime donner l’exemple du mât de la Tour de Montréal, très symbolique à mes yeux. Inachevé pour les Jeux de 1976, des étages restés vides et inutilisés pendant presque 30 ans. Il fallait le mettre aux normes, mais devant l’impossibilité de le reconstruire à l’identique, il fallait surtout le revitaliser et lui donner une nouvelle valeur d’usage tout en respectant la signature architecturale de Taillibert. C’est exactement ce que nous avons fait. Nous l’avons transformée et il y a maintenant plus de 1 200 employés de Desjardins et Sigma-RH, deux fleurons québécois, qui travaillent dans des espaces de bureaux avec une vue à couper le souffle et qui contribuent à la vitalisation du secteur.
À la réouverture des espaces touristiques de la Tour de Montréal, ça sera la même chose! L’ascension des visiteurs se déroulera dans un nouveau funiculaire de deux étages complètement vitrés, ils profiteront d’un observatoire rénové et modernisé, mais surtout, ils auront accès pour la première fois à l’extérieur par un édicule au toit et les plus téméraires pourront même se suspendre à une passerelle au pourtour du sommet. Le Stade olympique, quant à lui, pourra accueillir des événements 365 jours par année grâce à sa nouvelle toiture, les spectateurs pourront profiter de la lumière naturelle et vibrer au rythme des grands événements sportifs, culturels et commerciaux.
La clé dans la réalisation du virage commercial, c’est le développement et la consolidation de partenariats stratégiques, publics et privés, avec les grands joueurs des différentes industries et avec les acteurs de proximité du Quartier olympique. C’est ensemble que nous pourrons développer des programmations riches et variées et offrir une expérience exceptionnelle et complémentaire à nos clientèles des différents sites. L’exploitation de l’Esplanade Viau, qui est un terrain de pratique pour le CF Montréal et accueille des festivals musicaux depuis maintenant trois ans, en est un très bon exemple!
Le 76 : Quelles initiatives avez-vous en tête pour améliorer les services offerts aux citoyens?
En tant que société d’État, nous veillerons toujours à ce que le Parc conserve son accessibilité citoyenne en tout temps et en toutes saisons. Nous sommes très fiers d’offrir des espaces et des installations libres d’accès, comme le planchodrome aménagé en 2019, le sentier Morgan réaménagé en 2022 ou l’espace citoyen Vert Viau inauguré en 2023. Nous continuerons à mettre en place des initiatives pour valoriser et ancrer le parc urbain dans son milieu.
Parallèlement, notre objectif c’est aussi d’élaborer une programmation variée et équilibrée pour activer ces espaces, au service des citoyens, avec une offre accessible, conviviale et familiale, tout en attirant des visiteurs locaux et internationaux grâce à des événements à plus large envergure de portée internationale.
Nous continuerons donc d’offrir une programmation intéressante pour tous, tout en assurant l’amélioration de la qualité de l’expérience des usagers du parc urbain public dans le cadre des différents services offerts.
Sentier Morgan et planchodrome Vans. Crédit : SNAPePHOTO, Patrick Beaudry.
Le 76 : Quel rôle voyez-vous pour la technologie et l’innovation dans l’évolution du parc?
La technologie et l’innovation sont évidemment au cœur du virage commercial. Elles sont des éléments clés dans l’amélioration de nos services et dans la gestion de nos installations. La transformation du Parc touche à nos installations, mais aussi à la culture de l’organisation qui a adopté une orientation client. Lorsque nous ouvrirons à nouveau l’Observatoire et le Stade olympique, il sera essentiel d’offrir une expérience renouvelée, modernisée et innovante, qui intègre l’utilisation des nouvelles technologies.
Les activités et processus qui ne sont pas visibles de nos clientèles, mais essentiels à leur expérience, doivent aussi se transformer en se basant sur les technologies et les pratiques modernes et innovantes. Le succès de notre virage commercial passe par le succès de la modernisation et la bonne gestion de nos infrastructures, notamment par des bâtiments intelligents, résilients et adaptés au contexte évolutif des défis climatiques et de la transition énergétique. Nous travaillons donc sur des initiatives pour mieux gérer les espaces et optimiser les parcours tout comme les services offerts aux clients.
Le 76 : Comment voyez-vous le Parc olympique dans cinq ans, à la fin de ce premier mandat de PDG?
D’ici cinq ans, je vois un Parc olympique transformé qui joue pleinement son rôle pour le quartier, la ville et le Québec. Je vois un parc urbain grandement modernisé, ouvert et animé toute l’année, et surtout, chacun des sites qui le composent ayant atteint son plein potentiel dans ses secteurs d’activités spécifiques. En 2029, le Parc sera un lieu vivant et vibrant, où les familles, les citoyens, les sportifs, les spectateurs et les touristes viennent vivre des expériences mémorables. Le complexe sportif continuera d’ouvrir ses portes quotidiennement à des milliers de membres et à accueillir des événements sportifs de haut niveau. La Tour rénovée, dotée d’un nouveau funiculaire, transportera les visiteurs vers l’un des plus beaux observatoires en Amérique du Nord, avec ses étages locatifs toujours occupés à 100 %. Le Stade accueillera à l’année longue des événements de grande envergure, sportifs et culturels. Les espaces extérieurs, comme l’Esplanade Viau et l’Esplanade Pie-IX, seront animés par une programmation riche et diversifiée.
Dans cinq ans, nos partenaires du Quartier olympique auront aussi poursuivi leur développement et un projet d’hôtel devrait avoir vu le jour. Avec une offre d’hébergement sur le site, nous deviendrons une destination complète. On peut donc facilement imaginer des touristes qui viennent passer la fin de semaine pour visiter les musées d’Espace pour la vie, vivre l’ascension vers l’Observatoire et les émotions fortes de la passerelle, assister à un match du CF Montréal, à des festivals extérieurs et à des événements au Stade olympique pour retourner dormir à l’hôtel, fatigués et heureux. Notre rôle sera alors de programmer des activités 365 jours par année, consolidant notre position comme pôle récréotouristique de l’est de Montréal. Nous serons un vecteur économique important pour Montréal et pour le Québec, attirant les visiteurs et générant des retombées économiques significatives. Nous aurons consolidé notre virage commercial, tout en restant un parc urbain ancré dans son milieu, accessible et inclusif pour la communauté.
Le Parc olympique, nous y croyons. Et nous ne sommes pas les seuls : les acteurs clés du milieu y croient aussi. Nous saluons au passage la décision du gouvernement du Québec de moderniser notre mission et d’aller de l’avant avec le remplacement de la toiture du Stade, un projet structurant et stratégique. Nous vivons aujourd’hui une étape charnière de l’histoire du Parc, tournée vers le futur : cinq ans pour préparer les 50 prochaines années. Le Parc est plus grand que nous et nous survivra longtemps encore. C’est à la fois un devoir et un immense privilège que de bâtir pour les générations à venir.
Concert de l‘Orchestre Symphonique de Montréal, août 2024. Crédit : SNAPePHOTO, Patrick Beaudry.